jeudi 8 octobre 2009

Google et les éditeurs français se retrouvent au tribunal

Google comparaît jeudi 24 septembre devant le tribunal correctionnel de Paris. Lorsque le géant du Web a lancé en 2005 son programme de numérisation de livres, les éditeurs français ont peu apprécié de constater que des ouvrages dont ils détiennent les droits se retrouvaient sur le service de recherche de livres du moteur de recherche. En 2006, les éditions du Seuil et le Syndicat national de l'édition ont donc porté plainte pour contrefaçon. "D'après les estimations de nos adhérents, sur les 10 milliards de livres numérisés par Google, on trouve environ 100 000 ouvrages français encore soumis au droit d'auteur", explique Christine de Mazières, déléguée générale du Syndicat national de l'édition. "Google poursuit encore aujourd'hui la numérisation de livres : nous souhaitons qu'ils arrêtent cette politique du fait accompli", ajoute-t-elle.

Les éditeurs français ne sont pas les seuls à avoir protesté : leurs homologues américains eux aussi ont intenté un procès à Google, qui a numérisé et proposé de consulter sur Internet des livres n'étant pas tombés dans le domaine public. Mais aux Etats-Unis, le conflit ne s'est pas, pour l'instant, réglé au tribunal. Google a préféré proposer un accord à l'amiable aux éditeurs américains : 125 millions de dollars pour solder le contentieux, accompagnés d'un programme de partage de revenus assez favorable aux ayants droit pour les copies numériques vendues à l'avenir.

NOUVELLES NÉGOCIATIONS AUX ÉTATS-UNIS

L'accord, validé par les principaux syndicats d'auteurs et d'éditeurs, est aujourd'hui au point mort. Il avait fait l'objet de recours de la part d'autres associations et de concurrents de Google, qui estiment que le texte plaçait Google en situation de monopole, notamment pour les "œuvres orphelines", les textes toujours protégés par le droit d'auteur mais n'ayant plus d'ayants droit connus. Le ministère de la justice américain ayant également fait connaître son opposition au projet, l'examen de l'accord a été repoussé à une date ultérieure, et les différents acteurs sont de retour à la table des négociations.

En Europe aussi, Google et les ayants droit négocient en vue de parvenir à un règlement à l'amiable. "Nous n'avons jamais cessé de discuter avec Google, explique Christine de Mazières. Cela fait trois ans que nous négocions : ils nous ont fait miroiter beaucoup de choses, mais jamais de propositions concrètes. Avec Google, tout est très opaque."

Les éditeurs européens contestent aussi les termes du texte en cours de renégociation aux Etats-Unis. Il prévoit en effet que seront considérés comme "épuisés" – et donc soumis à un régime d'autorisations moins strict – les ouvrages qui ne sont pas disponibles dans le commerce aux Etats-Unis. Une grande partie des livres publiés en Europe n'étant pas distribués sur le territoire américain, de nombreux ouvrages tomberaient dans cette classification, ce qui donnerait par défaut le droit à Google de les scanner sans demander l'autorisation des ayants droit.

Or, la convention de Berne sur le droit d'auteur, signée par la quasi-totalité des pays au monde, prévoit que l'autorisation des ayants droit est nécessaire pour toute utilisation. Ce point est une condition sine qua non pour les éditeurs européens, qui souhaitent par ailleurs être associés aux nouvelles négociations qui s'ouvrent aux Etats-Unis. "Google est un partenaire incontournable", estime Christine de Mazières. "Mais nous sommes aujourd'hui au tout début de l'essor du livre numérique : nous ne pouvons pas le laisser pratiquer ainsi la numérisation sauvage de livres. C'est une question de principe." Le verdict est attendu d'ici la fin de l'année.

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